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DE L’ART ET DE L’ESPACE

 

Émerger. Disparaître pour mieux pointer le bout de son nouveau projet. C’est le choix de Julien Mineau, le chanteur de Malajube, présent lui aussi au festival FME. En 2012, le groupe Malajube, bien installé sur la scène rock, fait une pause. Julien part s’installer à la campagne, à une centaine de kilomètres de Montréal, à Sainte-Ursule. Il va y mener le projet Fontarabie, du nom d’une rue qui mène au cimetière de ce petit village québécois.

 

L’artiste a besoin d’air, d’art et d’espace. Et d’une nouvelle source d’inspiration. Il s’installe dans sa vieille maison, peuple son imaginaire de fantômes et de tourments et son studio d’une ribambelle d’instruments. Fontarabie est un projet réalisé sans limite et entièrement fait maison : « J’avais besoin d’avoir de faire les choses simplement par moi-même, avec l'envie d’apprendre à nouveau. Malajube était devenu trop gros. Même si c’est toi qui fait les chansons, tu es vite rattrapé. Ici, je suis arrivé, j’ai placé les micros et j’ai appuyé sur les boutons. Ce n’était pas trop réfléchi, c’était à l’instinct. »

Julien Mineau livre avec Fontarabie un projet à la fois expérimental, très instrumental et orchestral. Les éléments se mêlent aux enregistrements : le vent, la pluie, les tempêtes de neige et les craquements de la maison entrent en résonance avec les instruments, piano, wurlitzer, guitares, basse, tambours, percussions, violoncelle, mellotron, harmonium ainsi que le célesta. La trouvaille qui va donner du fil à retordre à Julien Mineau : « Je suis tombé sur le célesta, et j’ai trippé. Mais c’était une grosse contrainte, c’était complexe car ce n’était pas un 4/40 mais un 4/42, donc pas la même fréquence, il fallait désaccorder les autres instruments. C’était compliqué pour pas grand chose, juste pour avoir des petites clochettes, mais le défi est là, juste pour le plaisir. »


Pour peaufiner la production de son album, l’artiste sera rejoint dans son antre par d’autres musiciens québécois dont Simon Trottier (Timber Timbre), qui fera quelques aller-retour depuis Montréal. Avec sa retraite à la campagne, devant l’éblouissant tableau des feuilles d’érables rougissant l’automne arrivant, Fontarabie n’a pas uniquement trouvé son grand espace de survie artistique. Ce qui frappe lors de l’écoute de l’album, c’est la place singulière qu’il donne à sa voix, dans la proportion musique-voix mais plus encore dans son chant, très aérien. Julien Mineau se donne un nouveau souffle à ses projets artistiques, et ses mots (Union libre avec la peur) résonnent dans l’espace sonore avec ses maux.

Permis de séjour permanent. Nombreux sont les Français qui viennent s’installer dans le territoire francophone d'Amérique du Nord. Pour y trouver un boulot, pour se dépayser. Et peupler le Canada, pays à la faible densité de 3,3 habitants/km².



« En tant que Parisien, dès que je mets les pieds à Montréal, ça me fait beaucoup de bien : la nature dans la ville, les arbres, les  jardins derrière les maison, ça respire ! »



Pour d’autres, l’immersion est temporaire. Pour trouver un supplément d’âme artistique, Arthur H est venu au Québec écrire une partie de son album Soleil dedans. Le musicien a posé ses valises aux îles de la Madeleine, perdues au milieu du golfe du Saint-Laurent. Il décrit sa nouvelle production comme son « album de l’espace » : « Je trouve que la musique est une matière qui est faite pour aller loin, voyager dans l’espace, comme une onde qui ne s’arrête jamais. C’est très régénérant, c'est un mouvement perpétuel qui nous traverse en tant que musicien, mais aussi qui traverse les gens qui veulent bien ou danser ou écouter ou tripper avec nous. »


Arthur H est accompagné dans cette aventure par François Lafontaine, ancien musicien de Karkwa, réalisateur de musique de films et d’albums d’artistes québécois. Pour lui, l’espace est déterminant dans son travail. Le point d’orgue, c’est le studio : ​« C’est l’espace du son, une sorte de photographie où tu figes les choses dans le temps. L’endroit où tu vas créer va forcement avoir une influence. C’est aussi la manière dont tu places tes sons, tes micros dans l’espace, dans un cadre, mais tu peux pousser le cadre plus loin, toujours plus loin. »


La première partie de l’enregistrement de l’album Soleil dedans se fait dans un studio traditionnel. Puis l’équipe s’installe à Montréal, au Centre Phi, espace consacré à l’art contemporain. Durant cinq jours, sous l’œil des caméras, les internautes suivent quelques heures par jour sur le web les aventures, tâtonnements, improvisations et questions existentiellement artistiques des musiciens : « Ce sont parfois les plus beaux moments, on est entre nous, dans une sorte d’excitation totale, on est très joyeux, très tranquilles et excités à la fois... très tout!  La musique est toute neuve, plus intéressante qu’à la fin quand elle est mixée, emballée, fixée. C’était très chouette de pouvoir partager cela avec le public. »

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